Le 3 août 1994 cinq agents diplomatiques français sont assassinés à Aïn Allah.
Vers 07h00 du matin, un groupe de sept hommes armés se présente à visage découvert à bord de deux fausses voitures de la police algérienne à la cité « Ain Allah », près d’Alger, qui abrite le personnel de l’Ambassade de France et des membres de la Gendarmerie.
Le vigile à l’entrée n’exige pas les papiers d’identité et ouvre la grille. Malgré la sécurité, les terroristes pénètrent dans le complexe.
Après une prise d’otages, les trois gendarmes français Fabrice Decamps, Jean-Michel Serlet et Stéphane Salomon sont exécutés. Deux autres fonctionnaires du ministère sont abattus, et un autre gendarme blessé.
Avant de prendre la fuite, les terroristes laissent derrière eux une voiture piégée qui n’explosera pas.
L’attentat a été revendiqué par le GIA (Groupe Islamique Armé), dont le chef suprême, Djamel Zitouni, aurait lui-même dirigé le commando sur le site.
Pourtant, l’affaire en restera là, et les gouvernements successifs français ne semblent pas pressés de faire lumière sur les multiples zones d’ombre qui entourent cette terrible journée du 3 août.
Le 10 août 1994, Larbi Kechat, le recteur de la mosquée Addawa rue de Tanger dans le 19e arrondissement de Paris fait partie d’un groupe de 26 suspects assignées à résidence à Folembray (Aisne) sous les ordres de Charles Pasqua, alors ministre de l’intérieur.
Les liens de ces islamistes avec le FIS (Front islamique du Salut) et le GIA ne sont plus à prouver. Le gouvernement français soupçonne sans nul doute que Kechat, naguère proche du FLN et du FIS, a un lien avec Zitouni et l’attentat contre les gendarmes français.
Malgré les soupçons qui pèsent sur Kechat, il est relâché après un an d’assignation à domicile, sans aucune poursuite supplémentaire.
Les familles des victimes crient encore en ce jour, jusqu’à en perdre la voix, à l’injustice.
En septembre 1999, les proches constitués en partie civile, soutenus par le juge Jean-Louis Brugière, font part de leur déception face au silence des gouvernements Balladur et Chirac, qui persistent à taire l’affaire.
Dans une lettre, les proches témoignent de leur surprise face au silence des autorités judiciaires algériennes, avec qui la France semble avoir promis d’enterrer le dossier brûlant.
Au vu d’un voyage du président Jacques Chirac en Algérie, les familles demandent une fois de plus une interférence de la France dans cette affaire. La réponse est claire, Jean-Claude Antonetti répond au nom du président de la République que « le chef de l’Etat ne peut interférer dans cette procédure ». Aucune démarche n’aboutira.
Bien au contraire, lors dudit voyage en Algérie, Chirac promet à son allié et ex-colonie des aides et une contribution à Alger pour la réhabilitation de quartiers dévastés par les intempéries.
Que cherchait donc le gouvernement en dissimulant ce dossier ? De quel ordre fut la coopération sécuritaire entre Alger et Paris pour qu’un tel attentat reste impuni ? Pourquoi Larbi Kechat est-il encore aujourd’hui le recteur et imam de cette immense mosquée fréquentée par plus de 5000 fidèles ? Qu’est-ce que Kechat a pu apporter au gouvernement pour qu’un tel silence soit fait sur son assignation à domicile ?
L’ « agent double » présumé des renseignements français est, depuis début 2015, de nouveau inculpé pour une affaire de fraude, et accusé par ses pairs de détourner des fonds destinés à la reconstruction de la mosquée, des accusations qu’il récuse.
Dans une vidéo, intitulée « Les Fondateurs de la Mosquée Adda’wa Stalingrad dénoncent Larbi Kechat »
Entre autres accusations, Kechat est accusé par les quatre interrogés d’avoir pris le monopole de la mosquée Addawa, sans en être pourtant le fondateur. S’autoproclamant recteur et imam, il aurait imposé son islam, radical, dans la lignée des Frères musulmans, prônant en apparence et devant les non-musulmans le dialogue et la réconciliation. Pourtant, selon ses ex-collègues, il aurait quitté l’Algérie grâce à leurs seuls efforts. « Nous nous sommes pliés à ses besoins (…) et ensuite, il a osé nous mettre dehors ! ».
« Même s’il avait tort ou qu’il mentait, nous l’avons soutenu », affirme l’un des hommes. Et d’ajouter : « Mais maintenant, c’est fini. Si vraiment il est un homme, qu’il se taise ».
« Il égare, il ment », et répand son radicalisme, volant ses fidèles, les soudoyant.
Le dernier interrogé raconte comment Kechat piochait à l’envi dans les caisses de la mosquée, sans en informer les autres membres.
Il a également été au cœur d’un scandale après les attentats de Charlie Hebdo en janvier 2015. Parmi les fidèles de sa mosquée, les Frères Kouachi et la filière des Buttes-Chaumont venaient prier régulièrement devant ses yeux. « Je ne peux pas savoir qui vient prier », s’était défendu l’imam, pourtant proche de ses fidèles.
Encore une fois, Kechat sera blanchi par le gouvernement et s’en sortira indemne. Et l’UOIF (Union des Organisations islamiques de France) perpétue sa conquête de l’islam de France.